Un site aux potentiels culturels et scientifiques exceptionnels

Art, science et nature

Avant de penser à une nouvelle utilisation de l’abbaye, les membres de l’association ont pris le temps d’en comprendre les spécificités. Il ne s’agit pas seulement de bâtiments en quête d’usage mais d’un monument qui traverse les générations en transmettant une histoire et des valeurs particulières.
Une abbaye était à l’origine un lieu intellectuel, philosophique, spirituel et économique, très porté sur l’innovation et les techniques. Le fait qu’elle s’appelle Saint-Martin structure son existence autour du partage et de l’accueil, ce qui fut sa vocation jusqu’à son dernier propriétaire, une caisse d’assurance maladie.
Quant à sa géographie, elle plaide pour un dialogue avec les autres monuments de la ville, au premier rang desquels la cathédrale, ainsi que sur une continuité paysagère exceptionnelle entre le jardin d’Argentré et le parc de l’abbaye.
L’idée de l’association des amis de l’abbaye Saint-Martin s’appuie sur ces légitimités spécifiques. Très naturellement, émerge l’idée de créer un lieu de transmission des savoirs intellectuels, manuels et artistiques sans aucune césure ni aucune hiérarchie entre ces trois dimensions de l’expression humaine.

Outre son histoire propre et sa valeur intrinsèque d’abbaye, Saint-Martin de Sées dispose d’atouts très spécifiques qui octroient une forte légitimité au projet :

La cathédrale de Sées, chef d’œuvre du gothique rayonnant, est le résultat de la rencontre des savoir-faire des charpentiers de marine normands et des bâtisseurs médiévaux qui arrivaient avec l’expérience des chantiers d’autres cathédrales, comme Paris, Chartres ou Amiens. L’homogénéité de l’ensemble architectural et l’absence de labyrinthe à Notre-Dame de Sées tendrait à montrer que l’art de la construction, à la façon d’un chemin spirituel, terminait là une forme de complétude.

La cathédrale en images dans les spectacles Musilumières

À Sées, exista pendant près d’un siècle (à partir de 1835) une école artisanique qui plongeait ses racines dans les cours gratuits de dessin que prodiguait Victor Ruprich-Robert, architecte restaurateur de la cathédrale et dessinateur spécialisé dans les ornements sculptés. Son président le plus connu est Auguste Mottin, sculpteur sur bois et sur pierre, dont les œuvres ornent encore de nombreux monuments, parmi lesquels se distingue le fronton de l’entrée de l’abbaye Saint-Martin.

Biographie illustrée de Ruprich-Robert

Au hameau de Saint-Cénery-près-Sées, est né en 1755 Nicolas-Jacques Conté, dans une famille de paysans et rien ne le prédestinait à devenir peintre, physicien, inventeur et aérostier, si ce n’est son sens de l’observation et sa curiosité éclectique. Responsable de la logistique au cours de l’expédition d’Égypte, co-fondateur du Conservatoire des Arts et métiers, membre éminent de la Société d’encouragement de l’industrie nationale, cet homme qui vécût le demi-siècle entre les Lumières et le Premier empire n’est connu que pour son invention de la mine de crayon à la dureté modulable, alors qu’il conçût et réalisa de nombreuses machines et procédés qu’il souhaita verser immédiatement dans le domaine public.

« À l’ombre des Lumières », biographie romancée

L’abbaye Saint-Martin de Sées fut un haut-lieu intellectuel et spirituel de rayonnement européen aux XIe et XIIe siècles, notamment par les productions de son scriptorium. Les manuscrits enluminés qui nous restent, la « bible de Sées » du XIe, présentée comme un chef d’œuvre au Concile de Trente et un missel du XIVe siècle en témoignent. On venait d’Espagne, d’Italie et d’Angleterre pour se former à Sées. Les moines avaient de plus déployé des techniques d’assèchement de marais, de canalisation de l’eau pour la force hydraulique, de bâti (architecture, taille de pierre, maçonnerie…), de maraîchage, de productions piscicoles… qui leur permettaient une vie autonome basée sur les savoir-faire pratiques les plus novateurs.

Un manuscrit de la BNF, consultable sur le site Gallica

La rosace de tilleuls représente un ensemble remarquable qui donne à la nature une place particulière dans cette abbaye. Son origine est inconnue bien que relativement récente puisque nous disposons des plans des jardins de l’abbaye au XVIIIe siècle et elle n’y figure pas. On suppose qu’elle a été plantée par François Richard-Lenoir, au début du XIXe siècle, afin d’éviter le découpage du site. Elle ressemble à une roue de l’année celtique (deux solstices, deux équinoxes et quatre saisons), tout en faisant écho aux deux rosaces exceptionnelles de la cathédrale de Sées. L’arbre en tant qu’architecture vivante y est mis en valeur de façon très emblématique.

Plan du parcours historique de Sées